dimanche 15 mars 2009

Urba+ a lu et recommande...



Nous avions eu le plaisir de l'entendre à l'occasion du débat que nous avions organisé le 12 juin 2008 au Cnam : l'économiste Frédéric Gilli, directeur délégué de la chaire Ville de Sciences Po et rédacteur en chef de la prestigieuse revue Etudes Foncières, s'est associé à l'urbaniste et politiste Jean-Marc Offner (directeur du Latts de 2000 à 2008 et prochain directeur de l'agence d'urbanisme de Bordeaux) pour signer une contribution remarquée sur le Grand Paris. Urba+ recommande vivement la lecture de leur ouvrage intitulé, Paris, métropole hors les murs. Aménager et gouverner un Grand Paris, paru au début de l’année aux Presses Sciences Po. Très bien documenté et charpenté (en 6 chapitres cohérents), cet ouvrage revient sur la genèse de ce dossier politique majeur (re)mis à l’agenda en 2007 par le Président de la République. Une analyse très fine nous est proposée sur les grands enjeux métropolitains (urbanisme, mobilités, habitat, développement économique) ainsi qu’un décryptage salutaire du système d’acteurs francilien (relations entre l’Etat et les collectivités, radiographie des structures syndicales de coopération intercommunale, référentiels d’action publique, etc.). A l’heure où le débat politique s’agite (propositions Balladur), cette contribution tombe à point nommé.


Lire la critique de l’urbaniste Xavier Desjardins : "Paris, un temps à l’écart des grandes manœuvres territoriales, par le retard francilien en matière de structuration intercommunale, devient un objet central des "réformateurs territoriaux", puisque devenue figure majeure de la complexité en matière de gouvernance urbaine. Jean-Marc Offner et Frédéric Gilli, dans la première partie de leur ouvrage, démêlent patiemment les origines des difficultés institutionnelles et, dans les interventions des différents acteurs, distinguent les postures artificielles et conjoncturelles des vraies oppositions politiques et institutionnelles". Lire la fiche de lecture de Xavier Desjardins sur nonfiction.fr


Paris, métropole hors les murs. Aménager et gouverner un Grand Paris, Frédéric Gilli et Jean-Marc Offner, Presses de Sciences Po, Collection Nouveaux débats, janvier 2009 [N° ISBN : 272461092X]

samedi 14 mars 2009

Edouard Balladur suggère à présent une communauté urbaine comme « solution de transition »

Edouard Balladur a suggéré mardi 10 mars 2009, à l’occasion de son audition par les sénateurs, que soit créée une communauté urbaine de Paris. Cette piste alternative intervient après la « levée de boucliers » provoquée par sa proposition de fusionner les 4 départements de Paris et de la petite couronne pour constituer une collectivité singulière du « Grand Paris », de nature supra-locale. Le Chef de l’Etat ayant lui-même manifesté son scepticisme, Edouard Balladur propose une alternative fondée sur une logique de coopération intercommunale. « Il faut organiser une intercommunalité forte dans la petite couronne », a-t-il déclaré, signalant au passage qu’il n'y avait pas eu, au cours de ces dernières années, d'efforts et de volonté politique de créer une communauté urbaine autour de Paris alors que « la région Ile-de-France est la région où l'intercommunalité est la moins développée en France, en particulier dans la petite couronne ». « Peut-être qu'une solution de transition serait de créer une communauté urbaine » en attendant d’aboutir à la solution proposée dans son rapport, a-t-il suggéré.



samedi 7 mars 2009

Le Grand Paris et la gestion urbaine de proximité

L'Assemblée des Communautés de France (AdCF), qui s'est félicitée de la consécration institutionnelle du fait intercommunal dans le rapport Balladur (remis officiellement ce jeudi 5 mars), s'est également montrée très réservée sur le scénario proposé par le Comité pour la réforme des collectivités locales s'agissant du Grand Paris. C'est ce qu'on peut lire dans sa note de réaction au rapport de l'ancien Premier ministre :
"L’AdCF s’est toujours montrée consciente de la nécessité d’adaptations législatives aux singularités de la « zone dense » de l’Île-de-France. Elle a appelé à un traitement spécifique de son organisation institutionnelle et a participé aux débats en présentant plusieurs scénarios en 2007 lors de son Congrès de Paris. Plus récemment, le rapport Balladur a opté pour un scénario proche de celui préconisé par le rapport du sénateur Dallier, à savoir la constitution d’une collectivité sui generis, de nature supra-communale, issue de la fusion des 4 conseils généraux de la zone dense mais aussi de l’absorption des compétences intercommunales (syndicats techniques ou communautés) voire communales (Plans locaux d’urbanisme). Par-delà les enjeux politiques d’une telle option, cette dernière pose de véritables questions de gouvernance.
1. Elle interdit de fait aux maires du Grand Paris toute possibilité de coopération intercommunale.
2. Elle n’associe pas les maires au fonctionnement de l’autorité du Grand Paris (contrairement au Grand Londres) tout en les dépossédant de compétences importantes (urbanisme, habitat, déchets, eau, transports…)
3. Elle conduit à la constitution de deux collectivités « supra-locales » concurrentes (Grand Paris et région Ile-de-France) et à un conflit prévisible de leadership.
4. Elle propose un périmètre que nombre d’observateurs avisés considèrent comme trop vaste pour gérer des services de proximité mais trop étroit pour définir les grandes stratégies de l’agglomération physique (transports, développement économique, aménagement…) puisqu’elle exclut les grands pôles structurants (Roissy, Orly, Saclay, Cergy…) du modèle polycentrique poursuivi depuis Paul Delouvrier."

Afin de prolonger la réflexion, l’AdCF invite les élus et responsables des communautés franciliennes le 30 mars prochain au Sénat à débattre des perspectives de recomposition territoriale de la métropole parisienne et à échanger sur les perspectives d’évolutions financières et institutionnelles des communautés d’Île-de-France.
Le Grand Paris des Urbanistes livrera très prochainement ses propres analyses sur les tenants et aboutissants de la proposition Balladur.
Pour en savoir plus :

mercredi 4 mars 2009

Le "Grand Paris" du Comité Balladur : une impasse ? Par Ariane Azéma (sur Terra Nova)

Le Comité pour la réforme des collectivités locales, présidé par Edouard Balladur, préconise de créer en 2014 le "Grand Paris", une collectivité locale à statut particulier correspondant au territoire de Paris et des trois départements de la petite couronne (124 communes, 6,5 millions d'habitants). Ce scénario s'inspire du rapport du Sénateur Philippe Dallier, Sénateur de Seine-Saint-Denis. Beaucoup d'obervateurs considèrent que cette option "supra-locale" pose à la fois des problèmes pour le pilotage stratégique de la métropole parisienne (300 communes) mais aussi en termes de gestion urbaine de proximité (que les dynamiques de coopération intercommunale rendent souvent plus efficace). Selon Ariane Azéma, Conseillère du Président de la Région Ile-de-France, il faut prôner le consensus politique pour imaginer une métropole capable de faire face aux enjeux de justice sociale et d'identité qui se posent. C'est l'objet de cette prise de position que l'on peut lire sur le site Terra Nova



Note du Comité Balladur sur l'Île-de-France


On peut également relire le point de vue de Pierre Mansat, adjoint au Maire de Paris chargé de Paris Métropole, sur le Débat que l'association Urba+ avait organisé le 12 juin 2008 en pleine crise sur l'adoption du projet de SDRIF (le conflit entre l'Etat et la Région n'est d'ailleurs pas réglé). Au cours du débat Pierre Mansat avait alors plaidé pour une "fédération de gouvernements locaux" : un projet diamétralement opposé à la collectivité supra-locale du rapport Balladur.

Le point de vue de Pierre Mansat sur le débat Le Grand Paris des Urbanistes :


Depuis que l'Elysée s'en mêle, le « Grand Paris » est devenu mode. Et nombreux sont ceux qui se mêlent à la discussion en toute mauvaise foi ou, pire peut-être, en toute ignorance. Ce qui n'a pas été le cas, ce jeudi 12 juin, lors de la rencontre organisée au Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM) par le réseau de l'Institut d'urbanisme de Paris (IUP), appelé Urba+ (voir programme : http://www.pierremansat.com/article-20254874.html). Ce jour-là, urbanistes, acteurs du monde politique et économique ont donné leur point de vue du lieu dont ils parlaient. On était loin des discussions de café du commerce et des tactiques machiavéliques.

Sans surprise, il a été beaucoup question des inégalités sociales et des lignes de fragilité du territoire, ce qui a amené Gilles RABIN à se demander si « la région parisienne était un grand corps malade ! »
Sur la question du logement, Jean-Claude DRIANT, professeur à l'IUP, a rappelé que la pénurie d'offre est tout autant liée au nombre insuffisant de constructions (sur ce critère, l'Ile-de-France est avant-dernière en France, juste avant la Picardie !) mais aussi, à la « crise sélective de la mobilité ». En d'autres termes, le fossé s'accroît entre les propriétaires qui peuvent bouger et les locataires qui n'ont le choix - du fait de la rente immobilière - que de rester là où ils sont ou de s'éloigner des centres urbains, voire de quitter la région. Le taux de rotation dans le parc social est ainsi passé de 10% en 1998 à 6% actuellement. Comme l'a rappelé Jean-Luc VIDON, administrateur de l'AORIF (l'Union sociale pour l'habitat d'Ile-de-France), la moitié du patrimoine social de la région est concentrée sur 10% du territoire et l'écart augmente encore! Les files d'attente s'allongent, le mal logement se développe. Pour les décideurs politiques, le défi est double: construire, pour fluidifier la mobilité et rééquilibrer les territoires, mais aussi produire des types de logements répondant aux besoins des personnes, sans oublier les préoccupations de développement durable. Pour réaliser cet objectif, certains ont déclaré qu'il fallait un chef de file, comme il en existe partout ailleurs en France.
Côté emploi, G.Rabin a demandé à François BALLET, Secrétaire général scientifique de Sanofi-Aventis R&D (Val-de-Marne) ce qu'il « attendait d'un Grand Paris possible, souhaité, voulu ? » Pour le représentant de la firme pharmaceutique, l'affaire est entendue. La région parisienne est «attractive » car elle offre les profils d'expertise, la recherche publique, un réseau d'hôpitaux publics et la sous-traitance nécessaires. Mais la parcellisation des pouvoirs y est trop grande. Et de donner l'exemple du grand Lyon, où le leadership est plus clair. En d'autres termes, malgré la grande qualité des cerveaux franciliens du service public, en l'absence de leadership, le transfert des activités de la firme sous d'autres cieux est une option plausible.
La question de la gouvernance du Grand Paris ne pourrait donc attendre, contrairement à la déclaration radicale - « Ce sont les territoires qui décident de leur chef !» - lancée en introduction de la soirée par l'architecte-urbaniste, professeur au CNAM, Michel CANTAL-DUPART, qui, associé à Jean Nouvel, va coordonner l'une des dix équipes lauréates de la consultation internationale lancée par l'Élysée pour concevoir le futur aménagement du « Grand Paris ». (http://www.pierremansat.com/article-20182066.html?)

Volatilité des entreprises, périmètres d'interventions élargies, mur du logement, un Etat qui veut reprendre la main, qu'en disent les responsables des politiques publiques ? Mireille FERRI, Vice-présidente du Conseil régional d'Île-de-France (Les Verts) chargée de l'aménagement du territoire, a répondu par un éloge à l'intelligence collective, telle qu'elle a été mise en œuvre dans le projet de Schéma directeur de la région Ile-de-France (Sdrif) (ce schéma vise à répondre aux besoins actuels et futurs de la population en termes de logements, de transports, d'environnement et d'emploi). Le gouvernement, en décriant le SDRIF et en le jouant contre le projet du futur Grand Paris, a été désavoué par les résultats de l'enquête publique de fin 2007, la plus importante jamais réalisée (elle a touché 11 millions de FrancilienNEs) : le SDRIF a reçu un « avis favorable et unanime », assorti de quatre réserves essentiellement techniques, de la commission d'enquête publique, le mercredi 11 juin. Cette intelligence collective, M.Ferri la propose pour penser des espaces de coopération, institutionnels ou non, où coexisteraient les acteurs de différents échelons et où des formes souples de gestion règleraient les conflits d'usage et d'échelle. Dans ce cadre, Paris doit être envisagé comme le lieu central d'une organisation territoriale vaste, qui puisse travailler en interdépendance régionale, sur des sujets tels que, par exemple, la navigation fluviale.

Philippe DALLIER, Sénateur UMP de Seine-Saint-Denis, Maire de Les Pavillons-sous-Bois, membre de l'observatoire de la décentralisation du Sénat, lui, a déclaré avec force que le projet de la gouvernance est fondamental. Il a réaffirmé sa vision d'une gouvernance à trois niveaux : la commune, le Grand Paris et la région, tout en appelant au partage des richesses. Un point fondamental que ni Nicolas Sarkozy, ni Christian Blanc ne soulèvent...

En accord avec plusieurs des intervenants, j'ai ré-affirmé ma conviction de l'inadaptation d'un gouvernement par les institutions pré-métropolitaines actuelles, qui ne correspondent pas à une vision moderne de la ville, et où chacun campe sur son pré carré. Les inégalités de la région sont insupportables et les ressources comme les bénéfices doivent être partagées. « Je ne crois pas que le débat ait à porter, à cette étape, sur des problèmes de périmètre, voire même de nouvelles institutions, même si la question sera posée à un moment ou un autre » ai-je rappelé. « Je pense qu'on est à un moment où il faut réfléchir en termes d'emboîtements. La région a peut-être la bonne taille [ région métropolitaine], mais il faut s'atteler à la question non traitée : le cœur de la métropole ».

Paris a posé les termes du débat dès 2001 et a créé une scène provisoire de concertation, la Conférence métropolitaine, un lieu, une scène politique où les élus peuvent se parler, faire des diagnostics communs et qui redonne leur place aux maires - qui sont au coeur du système démocratique. Alors, quelle gouvernance ? Emboîtements des dispositifs, fédération de gouvernements locaux ? Et pourquoi pas, un OVNI institutionnel ? A géométrie variable. Paris Métropole.

Le débat sur le Grand Paris s'est étouffé à plusieurs moments de l'histoire. Il ne s'agit pas que cela se reproduise, au risque de voir les « territoires s'enfoncer de manière silencieuse » (M.Ferri) et de toujours plus de gestion urbaine répressive. Il en va d'une conception de la ville solidaire et active, où l'on ne se donne pas comme horizon l'attractivité, le positionnement international et la compétitivité de la croyance néolibérale. Dans ce débat, les citoyens doivent avoir toute leur place.

Pierre Mansat, Adjoint au Maire de Paris, chargé des relations avec les collectivités territoriales d'Île-de-France et du projet Paris Métropole


Voir les videos de son intervention :
http://www.dailymotion.com/playlist/xj1fn_cathgegout_grand-paris-des-urbanistes/video/x5rcuf_le-grand-paris-des-urbanistes-2-pie_news



http://planningforparis.blogspot.com/2008/06/comment-amnager-le-territoire-et.html