mardi 30 décembre 2008

En attendant les propositions du Comité Balladur (et celles de Christian Blanc) ...

Alors que le débat sur le Grand Paris devient de plus en plus touffu (pour ne pas dire épineux), rappellons 3 contributions décrivant le problème de l'organisation territoriale de la région urbaine de Paris. Toutes les trois datées d'avril 2008, elles ont le mérite de la clarté et constituent de solides diagnostics, utiles pour orienter les différents protagonistes sur les pistes de réforme envisageables. A commencer par les membres du "Comité Balladur", chargés par le Président Sarkozy de plancher sur la (très attendue) "réforme territoriale". Pour l'heure, l'hypothèse d'un projet de loi spécialement dédié à la Région Île-de-France tiendrait la corde... Dans l'attente du rendu des propositions de l'ancien Premier ministre - et sans oublier les projets de Christian Blanc qui devraient être annoncés au même moment ni la structuration du syndicat mixte d'études "Paris Métropole" - on peut toujours méditer sur ces 3 contributions qui ont le mérite de dresser un état de lieux de la situation géopolitique actuelle, à "gouvernance constante" pourrait-on dire. En guise de synthèse, nous reprenons un article de David Le Bras et de Philippe Schmit, respectivement responsables des politiques urbaines et de l'action régionale au sein de l'Assemblée des Communautés de France (AdCF), paru dans Intercommunalités, N° 122, avril 2008, page 4.



L’intercommunalité francilienne et le Grand Paris sous les feux de la rampe
Par David Le Bras et Philippe Schmit, AdCF

Un sujet largement débattu : c’est le moins que l’on puisse dire à propos de l’intercommunalité francilienne. Du rapport « Scenarii pour la métropole Paris - Île-de-France demain », émanant du conseil régional d’Île-de-France, à l’autosaisine du CESR, intitulée La contribution de l’intercommunalité à l’action régionale, en passant par le Grand Paris, un vrai projet pour un enjeu capital présenté par le sénateur Philippe Dallier pour le compte de l’Observatoire de la décentralisation, force est de constater que la question de l’organisation intercommunale de la région parisienne nourrit l’actualité politique post-municipale.

Au conseil régional

Le travail du conseil régional d’Île-de-France est le fruit d’une commission constituée le 25 octobre 2007 dernier et présidée par Jean-Paul Planchou. L’objectif de ces conseillers régionaux était d’examiner les possibles évolutions organisationnelles ou institutionnelles de l’agglomération francilienne, et particulièrement de son coeur. À cet égard, les édiles proposent d’engager, dès à présent, un triple mouvement reposant, tout d’abord, pour le coeur d’agglomération, sur la structuration de la coopération entre collectivités locales afin de donner à la zone dense les moyens de sa structuration institutionnelle et de faire émerger un projet partagé ambitieux. Ensuite, pour la métropole et la région dans son ensemble, il s’agit de mettre en oeuvre les réformes nécessaires à une plus grande attractivité, à une meilleure qualité de vie et à une efficacité optimale des politiques publiques d’échelle métropolitaine. Pour l’ensemble des collectivités, enfin, ils affirment la nécessité de moderniser les conditions financières et fiscales indispensables à la concrétisation de ce nouvel élan.

Rapport Dallier

« Il y a trop de pilotes dans l’avion et le mille-feuille institutionnel est incompréhensible et inadapté au besoin criant de cohésion et de solidarité qui caractérise le coeur de l’Île-de-France » allègue, quant à lui, Philippe Dallier, sénateur de Seine-Saint-Denis, dans son rapport. En effet, des nombreux scénarii aujourd’hui en débat, l’élu francilien n’en retient qu’un seul. Il propose de construire un Grand Paris qui se substituerait aux quatre départements actuels de la petite couronne. L’idée d’une intercommunalité nouvelle, qu’elle soit syndicale ou communautaire, est totalement écartée. Le modèle communautaire a, selon lui, de nombreuses vertus, mais n’est pas une solution adaptée aux spécificités de la première couronne. C’est pourquoi il propose une architecture à trois niveaux pour le coeur de l’agglomération : une région, un Grand Paris, des communes. Dès 2010, une loi pourrait opérer la fusion des départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne « qui n’ont jamais été des échelons de proximité ». Les actuels conseillers généraux seraient amenés à gérer les 5,5 milliards de budget consolidé et à exercer les compétences des départements dans ce nouveau périmètre de solidarité. En 2011, une nouvelle loi créerait le « Grand Paris » au statut sui generis. Ses compétences seraient limitées au transport, au logement, au développement économique et social, et à la sécurité. Les autres compétences, aujourd’hui départementales, seraient partagées entre la région (grandes infrastructures, collèges) et les communes qui ont la taille suffisante (ce qui les différencie du reste de la région et des autres régions) pour assurer les services de proximité et la relation directe avec les bénéficiaires du RMI ou de l’APA… La collectivité serait dotée d’un budget et de ressources propres (celles perçues aujourd’hui par les départements). Le président du Grand Paris serait élu au suffrage universel direct. Ce scénario, qui vise « à supprimer toutes les frontières départementales au sein d’un périmètre de cohésion, de péréquation, de solidarité », s’accompagnerait d’une disparition des communautés d’agglomération de la première couronne, dont le périmètre est jugé peu pertinent au regard des enjeux.

Au CESR

Bien que lucide sur les imperfections des périmètres de certaines communautés franciliennes, le conseil économique et social régional (CESR), par le biais de son président, Jean-Claude Boucherat, préconise l’achèvement de la couverture régionale par l’intercommunalité, interlocuteur local indispensable pour le Conseil Régional. Sur la base de politiques contractuelles renforcées et sous réserve, entre autres, d’une clarification précise des compétences respectives, la mise en oeuvre du SDRIF est présentée comme une opportunité à saisir pour donner un sens supplémentaire aux projets locaux. Il suggère que les politiques régionales soient systématiquement déclinées à l’échelle intercommunale. Le rapporteur du rapport soulignait, lors de la conférence de presse, que « le mouvement intercommunal en Île-de-France est encore jeune ; il est, certes, perfectible mais ne peut être remis en cause sans que la mobilisation soit forte pour lui donner sens ».
Sensiblement distincts dans leurs analyses, leurs préconisations et leur niveau de prescription, les rapports du conseil régional d’Île-de-France, de l’Observatoire de la décentralisation et du CESR ont en commun de contribuer à la mise en débat de l’intercommunalité en Île-de-France. Autrement dit, alors qu’elle était largement absente des récentes élections municipales, la question communautaire occupe désormais le devant de la scène politique locale.
David Le Bras et Philippe Schmit



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