L’Institut d’Urbanisme de Paris (IUP), plus ancienne école française d’urbanisme, a acquis une expertise reconnue sur l’aménagement urbain et le développement territorial de l’agglomération parisienne, et ce depuis les premières années de sa fondation, dans les années 1920. Les fondateurs de l’Ecole des Hautes Etudes Urbaines, l’ancêtre de l’Institut d’Urbanisme de Paris, sont en effet parti prenants des grands débats qui agitent la société urbaine, en particulier autour de la capitale : qu’il s’agissent des premières grandes initiatives en matière d’habitat social (le "logement à bon marché"), de la réflexion menée à Paris sur l’extension de l’agglomération et les services et équipements urbains en banlieue (le système de transport collectif, avec le chantier du métro), ou le débat autour de la destruction de l’enceinte défensive parisienne débouchant sur la question des "espaces libres".
Mais ces problématiques urbanistiques sont également indissociables des questions institutionnelles propres à l’agglomération parisienne. En effet, sous l’égide d’Henri Sellier, maire socialiste de Suresnes de 1919 à 1941, co-fondateur dès 1919 avec Marcel Poëte de l’Ecole des Hautes Etudes Urbaines, émerge une approche intercommunale des politiques d’habitat à l’échelle de l’ancien département de la Seine. Ce pionnier avait ainsi fondé dès 1915 l’office départementale d’Habitation à bon marché, un des grands syndicats techniques, qui ont joué le rôle de leviers d’intégration des banlieues parisiennes. L’historien Emmanuel Bellanger montre dans ses travaux que la promotion des solidarités intercommunales en proche banlieue est (déjà) garantie par plusieurs institutions de défense des intérêts suburbains, institutions de médiation sur lesquelles s’appuient les maires de proche banlieue pour la recherche du compromis politique. Ces institutions du "compromis intercommunal" ont pour nom l’Union des maires de la Seine créée dès 1909, la direction des affaires départementales de la préfecture de la Seine qui assure le gouvernement exécutif du "Grand Paris" et l’association des secrétaires généraux de mairie fondée dès 1862 sous l’autorité du préfet Haussmann. Elles sont relayées par deux écoles pionnières de professionnalisation du personnel communal : l’École des hautes études urbaines sous les auspices du conseil général de la Seine et l’École nationale d’administration municipale (ENAM). Ces institutions, coparrainées par la préfecture et les collectivités locales, forment les administrateurs des communes et assument une fonction de rationalisation de la conduite des affaires municipales. Henri Sellier assure alors le lien entre l’Institut d’urbanisme de Paris et le Conseil Général de la Seine, et plus globalement le corps politique. Si la pluridisciplinarité universitaire est une des grandes originalités de cette institution, sa volonté de se situer à l’interface des savoirs académique, techniques et de la décision attire l’attention dans le paysage intellectuel de l’époque. Outre le Diplôme de l’Ecole, débouchant sur la présentation d’une thèse d’urbanisme, une Section de Perfectionnement administratif, organisée à partir de 1922 sous le nom d’Ecole Nationale d’Administration Municipale, assure une formation continue pour les fonctionnaires municipaux des communes urbaines et de banlieue. A partir de 1924, l’Ecole des hautes études urbaines rejoint la Sorbonne sous le nom d’Institut d’Urbanisme de L’Université de Paris (IUUP).
L’Institut d’Urbanisme de Paris en 10 dates clés :
La trajectoire de cet Institut de formation et de recherche en urbanisme, du centre de Paris à la banlieue, puis au sein même du Nouveau Créteil révèle à sa façon les rapports entre l’enseignement supérieur et la ville.
1916 : Création de l’Institut d’histoire, de géographie et d’économie urbaines auprès de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris pour prolonger la réflexion de la Commission d’extension sur Paris et son agglomération (1911-1913)
1919 : Création de la revue La Vie urbaine, organe principale de publication de l’Ecole des Hautes Etudes Urbaines (EHEU), fondée la même année sous l’égide de Marcel Poëte et de Henri Sellier. La revue interrompt sa publication de 1940 à 1950, puis la reprend jusqu’en 1977.
1922 : Mise en place de l’Ecole Nationale d’Administration Municipale, section de perfectionnement administratif de l’EHEU
1924 : L’Ecole des Hautes Etudes Urbaine est rattachée à la Sorbonne et prend le nom d’Institut d’Urbanisme de l’Université de Paris (IUUP).
1933 : L’IUUP est accueilli au sein l’Institut d’art et d’archéologie près du Luxembourg, dépendant de la Sorbonne.
1968 : Les événements de Mai 68 et la déconcentration universitaire voulue par Edgar Faure ont pour conséquence la délocalisation de l’IUUP, à l’époque dirigé par le juriste Georges Burdeau (qui a succédé en 1964 à l’historien Pierre Lavedan). L’institut quitte le centre de Paris pour être rattaché à une nouvelle université : Paris-Dauphine, dans le XVIe arrondissement. Il prend le nom d’Institut d’Urbanisme de Paris (IUP)
1972 : Après quelques années d’incertitude, l’Institut d’Urbanisme de Paris rejoint l’université nouvelle de Paris 12 Val de Marne localisée à Créteil, ville érigée en Préfecture suite à la réorganisation administrative de la région parisienne.
1992 : Le Diplôme de l’IUP (DIUP) se transforme en un DESS Urbanisme et Gestion des Villes
1995 : Naissance d’Urba+, association des anciens élèves de l’Institut d’Urbanisme de Paris
2006 : Les DESS et DEA de l’Institut d’Urbanisme de Paris se fondent dans le Master Urbanisme et Territoires
Les domaines d’expertise sur la métropole parisienne présents à l’Institut d’Urbanisme de Paris aujourd’hui :
De nombreuses problématiques abordées par les enseignants chercheurs de l’IUP concernent particulièrement les politiques publiques d’aménagement en région Île-de-France, permettant ainsi à l’Institut de maintenir un niveau d’expertise reconnu sur la métropole parisienne.
Parmi les sujets de prédilection, on peut mentionner :
L’étude des dysfonctionnements des marchés du logement en région Île-de-France (Jean-Claude Driant)
L’étude de l’efficacité du système de transports collectifs francilien (Jean-Pierre Orfeuil)
L’analyse des stratégies territoriales et urbaines en Région Île-de-France (Daniel Béhar)
L’analyse de la géographie socio-fiscale de l’intercommunalité francilienne (Laurent Davezies) -
voir notamment Béhar D., Davezies L., Korsu, E. (1999) "Pauvreté, inégalités sociales, inégalités fiscales : un réexamen dans le contexte des nouveaux modes d’intervention de l’Etat sur les territoires". Rapport pour le Préfet d’Ile de France. Acadie/OEIL-IUP-UMPVM. Paris, Créteil, Février 1999, polyg. 80 pages+Synthèse de 15 pages.- L'histoire des politiques du logement et des grandes opérations d'urbanisme dans les villes nouvelles d'Île-de-France (Laurent Coudroy de Lille)
L’étude des politiques de transport de marchandises en Région Île-de-France
L’analyse sociopolitique des conflits associés aux nuisances environnementales autour des plate-formes aéroportuaires en région parisienne (Guillaume Faburel)
Sources :
Emmanuel Bellanger, "Le Grand Paris, sa banlieue rouge et ses solidarités intercommunales : les leçons de l’histoire", article publié sur le Blog Paris Métropole
Histoire de l’IUP - Eléments chronologiques, par Laurent COUDROY de LILLE, 1997, révisé en 2002
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